La mission du RENSEP est de promouvoir et de faire progresser l’étude interdisciplinaire et comparative des pratiques ésotériques dans une perspective globale, avant tout via sa plateforme en ligne qui permet aux chercheurs théoriciens et aux chercheurs pratiques de différents milieux et disciplines de se rencontrer et d’échanger leurs analyses et interprétations de pratiques ésotériques avec un regard sans a priori, apolitique, non idéologique et basé sur les données. En plus de cette plateforme en ligne, le RENSEP finance l’étude des pratiques ésotériques, par exemple pour les requêtes et autres formes de collecte de données, pour la création de bases de données, pour l’organisation de conférences et d’ateliers, pour l’octroi d’aides ponctuelles (p. ex., pour les voyages) ainsi que pour les bourses de doctorat, pour soutenir des initiatives de réseaux connexes ou pour financer des projets de publication pertinents. Le programme de recherche du RENSEP est multidisciplinaire, mais il est axé sur les disciplines fondamentales de l’histoire des religions, de l’anthropologie, de la psychologie (y compris la science cognitive de la religion et des neurosciences) et des arts.
En ce qui concerne la recherche en histoire des religions, le RENSEP n’est pas en mesure de financer des projets de recherche à part entière sur l’histoire des pratiques ésotériques, qui consomment généralement d’importantes ressources en temps et en argent. Pourtant, le RENSEP souhaite poursuivre la recherche historique sur les pratiques ésotériques en accordant des financements à court terme (1 à 3 mois) pour la visite de bibliothèques de manuscrits ou d’archives, selon la pertinence et l’originalité du projet de recherche.
En se concentrant sur l’anthropologie, le RENSEP souhaite dépasser les champs de recherche occidentaux ou européanistes et adopter une perspective globale sur les pratiques ésotériques. Encore une fois, le RENSEP ne peut pas financer des projets de recherche anthropologique à part entière, à l’exception de quelques bourses de doctorat. La stratégie du RENSEP est de collaborer systématiquement avec le CAS-E, le Centre d’études avancées sur « les rationalités alternatives et les pratiques ésotériques dans une perspective globale » à l’Université Friedrich-Alexander Erlangen, à Nuremberg, et éventuellement d’autres instituts de recherche à vocation anthropologique et axés sur les pratiques ésotériques. Le premier projet de doctorat du RENSEP en anthropologie est celui de Zheng Liu sur un devin chinois I-Ching contemporain. Par ailleurs, le RENSEP lancera le projet vidéo « Joyaux du terrain » (Gems from the field en anglais) qui présente des séquences vidéo originales inédites dans l’étude anthropologique des pratiques ésotériques avec commentaires et interviews.
Le RENSEP adopte une triple approche en matière de recherche psychologique. Le RENSEP reconnaît les approches récentes dans l’étude cognitive de la religion qui ont cartographié et exploré les processus mentaux qui augmentent la probabilité que les acteurs humains croient en des agents contre-intuitifs ou attribuent une efficacité extérieure aux rituels. Alors que ce type de recherche est désormais bien établi, le RENSEP entend aller au-delà du paradigme psychologique actuel dans deux directions. Tout d’abord, le RENSEP prévoit de financer des projets de recherche avec des reconstitutions de procédures rituelles, en particulier de rituels collectifs, de manière contrôlée et systématique afin d’explorer les effets de ces rituels sur la psyché humaine ainsi que les répercussions additionnelles. Deuxièmement, le RENSEP souhaite entreprendre des recherches qui testent systématiquement l’efficacité de certaines pratiques ésotériques d’une manière contrôlée et expérimentale. En faisant cela, le RENSEP n’approuvera pas la perspective d’un praticien – ou d’une personne religieuse– sur les pratiques ésotériques, ni ne se contentera de l’académisme commun qui tente d’expliquer les prétendus effets des pratiques ésotériques en pointant du doigt les processus de « fabrication » socio psychologiques ou cognitifs. Surtout en ce qui concerne l’efficacité de la magie, il n’y a toujours pas d’étude systématique et expérimentale de la magie, d’où le fait que la validité des deux perspectives – l’acceptation a priori ou le rejet a priori de l’efficacité extra-mentale – reste jusqu’à présent entièrement spéculative, ou même purement idéologique, et donc ouverte à une évaluation scientifique critique. Le RENSEP favorise l’émergence d’une étude factuelle de la magie qui va au-delà de ces deux suppositions et explore le sujet d’une manière vraiment scientifique, c’est-à-dire dans un esprit de curiosité, neutre, ouvert et non idéologique. Le RENSEP est disposé à financer des études expérimentales qui repoussent les limites de la recherche académique acceptée dans ce territoire inexploré.
Le RENSEP s’intéresse tout particulièrement à l’art ésotérique car c’est un médium qui peut thématiser les pratiques ésotériques vis-à-vis du grand public, mais qui peut aussi devenir une pratique ésotérique en soi. C’est surtout ce dernier phénomène – l’enchevêtrement des pratiques ésotériques et artistiques – qui intéresse le RENSEP, conformément à son approche praxéologique. À travers la nature transgressive de l’art dans les discours culturels ainsi que sa capacité à jouer avec les subtilités, les nuances et les ambivalences, l’art est susceptible de promouvoir un intérêt pour les pratiques ésotériques et de favoriser des interactions et des conversations animées à travers divers discours et milieux. Le RENSEP finance donc des projets et des activités d’artistes à court terme (1 à 3 mois) en lien avec ses partenaires de recherche (HHP, Cini, Fulgur), et prévoit une grande conférence collaborative en 2024 sur le thème de la relation entre l’art et les pratiques ésotériques.
Priorités pour 2023
2023 sera la première année des activités scientifiques et du programme de financement du RENSEP, c’est pourquoi ses priorités reposent sur des projets qui (a) correspondent fortement et illustrent le programme de recherche du RENSEP ; (b) ont une composante stratégique en ce sens qu’elle améliore les collaborations du RENSEP avec des partenaires de recherche clés (p. ex., PSH, SAE-E, Rice); (c) comblent les lacunes actuelles de la recherche sur les pratiques ésotériques, ce qui rehausse la valeur et la réputation perçues du RENSEP sur le plan universitaire; (d) repoussent et transcendent les limites communes de la recherche dans les pratiques ésotériques en abordant des sujets que la recherche financée par les universités a tendance à éviter et en établissant des collaborations stratégiques avec des praticiens pour la coproduction de connaissances sur les pratiques ésotériques; et (e) ont une ampleur extraordinaire ou inhabituelle, ce qui intensifie la perception et la sensibilisation du public au RENSEP. En général, comme les fonds sont limités, l’approche du RENSEP est d’investir dans des projets où même des fonds minimes peuvent produire de grands résultats.